vendredi 23 avril 2010

Biennale Estuaire 2010









1- Description physique de l’installation.

L’installation se présente au spectateur en tant qu’objet géométrique monolithique, sobre sombre minimal : un pavillon
décomposé en trois entités, trois observatoires du réel distancés de 120cm les uns des autres. Les pavillons sont constitués d’une enveloppe en bardage bois goudronné à l’intérieur et à l’extérieur, d’une hauteur de 4 mètres pour un diamètre de 8 mètres. La structure en ossature bois permet une construction légère, évitant toute fondation, elle est ainsi posée juste sur plots.
La préfabrication en usine des quinze pans de bois permet un assemblage sur site rapide et propre, ainsi qu’une minimisation des coûts de construction.
Le projet est d’apparence extérieure monolithique mais son aspect introverti ne se révèle que lorsque l’on pénètre au sein des pavillons. Les passages étroits entre chaque élément est une première mise en abime avant de se retrouver au centre du dispositif où trois entrées s’offrent aux visiteurs. Ainsi avant de rentrer dans l’un des pavillon on ne peut savoir à quoi s’attendre. Chaque capsule d’observation du territoire de l’estuaire referme un dispositif d’appréhension du paysage dont son architecture lui est propre, correspondant à son mode d’utilisation et de représentation.

Trois capsules :

1- La vision oculaire : une faille doublée d’une table panoramique propose une mise en scène du paysage observé, une théâtralisation du paysage. On pénètre dans ce pavillon sans voir directement l’extérieur, des marches en gradin invite à faire une ascension vers le point de vu proposé.

2- La vision focale : une longue-vue permet une immersion dans le paysage et pose la question du site remarquable mis en valeur. Dans ce pavillon, les marches en gradin vont à l’opposé du territoire regardé. Une estrade permet ainsi de surplomber l’environnement à proximité. Une ouverture circulaire permet de laisser passer le cône de vision de la longue-vue.

3- La vision numérique : retranscription en temps réel sur une surface courbe blanche par vidéoprojection de fragments
de l’estuaire filmés par caméras. Dans cet espace, le visiteur est plongé dans une installation panoptique rendant la nature hors échelle. Les corps sont placés dans une échelle territoriale similaire à celle du biotope de l’estuaire.


2- Description conceptuelle du dispositif.

Le projet propose aux visiteurs une approche du territoire à multiple facette.

Premièrement le pavillon par son positionnement géographique implique le visiteur à parcourir un lieu dont il n’aurait à priori eu aucun désir d’arpenté sans appréhension (Junkspace). C’est parcourir l’estuaire là où on ne l’attend pas. Ce dispositif permet d’activer la curiosité des individus face à territoire d’apparence négative.
Deuxièmement le pavillon est un corps constitué d’organes introvertis qui ne s’offre que lorsqu’on pénètre au sein des trois dispositifs qui le composent. Nous proposons une vision d’un territoire qui est morcelé, réapproprié par les différents systèmes de visions.
L’installation proposée est un dispositif d’observation du paysage. Il ne s’agit en aucun cas de tenter de retranscrire le réel, mais plutôt de proposer une approche dans l’appréhension d’un territoire, un regard sur le paysage ou la façon de regarder importe autant que le sujet observé. Un pavillon qui propose non pas d’être le point névralgique de l’attention, mais plutôt un élément de partage avec le paysage de l’estuaire.
Le projet est à la fois un objet architectural et un dispositif d’exploration du territoire.
Objet centripète : l’objet minimal intrigue et attire à lui les spectateurs, au comportement schizophrénique: une fois à l’intérieur on est renvoyé à l’environnement extérieur.

Projet qui entre pleinement en résonance avec le territoire de l’estuaire comme dispositif d’activation de curiosité, offrant un point de vue a 360 degrés d’une réalité subjective. Le pavillon est une sorte d’expensseur de la perception territoriale.

Le projet n’est en aucune sorte une tentative de retranscription fidèle du réel, l’installation offre des visions subjectives du paysage. C’est une proposition d’une déformation du réel proche par l’intermédiaire de système de visée qui déforme la perception pour révéler l’un environnement subjectif.
L’appareil de visée modifie le regard que l’on a du paysage, une sorte de sacralisation du réel. C’est un outil didactique d’ appréhension de ce qui est autour de soi. Produire du beau, du curieux avec du rien, proposer une conception très contemplative de la moindre parcelle de non-lieux et de cadrages subjectivisants.
Le pavillon crée pour l’estuaire, comme objet de découverte de territoire de l’estuaire peut être déplacé partout, on ne regarde par un contexte on est beaucoup plus abstrait on regarde ce que l’oeil n’est plus habitué à voir, la subjectivité de l’expérience transcende l’émotion.

Accessible pour tous, l’abstraction n’est pas une barrière sélective du type de spectateur à attirer mais une liberté d’interprétation qui est donné a tout un chacun et la seule chose que l’on voit réellement (à savoir la mer) c’est un immensité abstraite qui renvoie a tous nos fantasmes, chacun y voit ce qu’il y cherche.
le projet se pose comme une architecture sobre, sombre, radicale, introvertie, intrigante et curieuse.

3- Une approche territoriale, une expérience unique.

Sous le néologisme « landscope » – contraction de l’anglais « landscape [paysage] » et de « scope [du grec skopein : observer] » –, le paysage est envisagé autant comme site que comme vue.
Une vision éclatée, scènes qui demeurent des « paysages d’évènements » (P. Virilio), de véritables situations – au sens de sites –, résultant de la collision de systèmes et de registres formels, logiques et scopiques empruntés à l’histoire de la vision et de la représentation.
L’oeil n’est que l’outil, toujours tâtonnant, de l’ajustement de la conscience au réel. Tout observateur, et par là même tout artiste, s’impose dès lors comme une camera osbcura, profondément dysfonctionnelle mais créative. Il s’agit ici d’explorer la nature de l’emprise qu’exerce un dispositif perspectif non naturaliste sur la perception1. Cette installation révèle l’impureté de notre vision: nous ne voyons jamais le monde dans sa transparente évidence.
Fusions, de sites et de point de vues, désormais privées de leur articulation logique et spatiale au profit de paysages morcelés et kaléidoscopiques.

Hannah Arendt a relevé que la fabrication de quelque chose (oeuvre d’art, objet usuel...) dépendait de la mentalité des personnes qui l’ont fait exister. Cette mentalité, ou manière de penser, détermine sa réalisation mais aussi sa réception.
Une place publique conçue avec la volonté de dominer ne donnera pas envie de la traverser. De même la disposition sensible d’un dispositif est ressentie quand nous en faisons l’expérience. Elle peut nous faire comprendre notre temps et ce que nous ressentons confusément en nous, comme si elle éveillait des sensations et des pensées recouvertes par l’habitude. Elle peut aussi aider à penser l’avenir du lieu dans lequel nous sommes. Cela est activé quand l’expérience est partagée, porteuse de sens, de possibilités et de sentiments pas seulement individuels. Une expérience de la pluralité.